Parfois un arbre …..
Durgalola à la barre du bateau des croqueurs de mots pour la quinzaine nous demande :
Imaginez que vous êtes un arbre (chêne, bananier, charme, ce que vous préférez)
et racontez votre histoire en une trentaine de lignes.
Au début de votre texte, vous insèrerez une citation ou un proverbe relatif à un arbre.
Les quatre tilleuls de la croix Cueillat
“Parfois un arbre humanise mieux un paysage que ne le ferait un homme” disait Gilbert Cesbron . Je crois bien que quand vous aurez lu mon témoignage , vous n’en serez pas complètement convaincus . Car si “chaque arbre est le symbole vivant de la paix et de l’espoir” d’après Marie Louise Taos Amrouche il est parfois le témoin d’une histoire bien cruelle .
Du plus loin que je me souvienne, j’ai toujours été accompagné de mes trois frères au lieu dit de la croix Cueillat , sur cette colline qui domine la cité messine . Tilleul maintenant plus que centenaire , je n’ai pas toujours été le lieu privilégié des ébats joyeux des écureuils voltigeurs infatigables, le spectateur ravi des courses effrénées de chevreuils enivrés par l’ingestion des bourgeons printaniers , des rendez – vous galants des villageois des les premières flèches lancées par Cupidon . Comme j’aurais aimé ne me concentrer que sur les gazouillis des nichées des merles moqueurs qui chaque année égayent mes branches , me laisser surprendre par les cris rauques et stridents des geais se muant d’un seul coup en miaulements ou gloussements . Mais non il a fallu que j’entende des cris beaucoup plus dramatiques et que j’assiste à des scènes que j’ai bien du mal à oublier maintenant même après toutes ces années .
J’avais l’habitude de les voir passer ces villageoises qui se rendaient régulièrement à la source des Marivaux de Plappeville pour y cueillir des herbes ou ramener de l’eau . Elles échangeaient leur recette pour guérir les maux des hommes et des bêtes , elles ne faisaient de mal à personne bien au contraire. Elles connaissaient le pouvoir des simples et le transmettaient de mère en fille. Bien des villageois préféraient leurs remèdes à ceux des médecins patentés. Mais il faut croire que cela ne plaisait pas aux échevins car un jour des hommes arrivèrent ici en grand nombre, ils accusèrent ces femmes de sorcellerie , d’aller au Sabbat en Marivaux, de rendre hommage au diable dans des incantations entendues partout dans la foret , de s’accoupler avec des démons . J’en avais des frissons dans mes feuilles en entendant les horreurs qu’ils débitaient sur ces pauvres malheureuses. Elles portaient encore les traces des tortures qu’on leur avait infligées pour qu’elles avouent leur sorcellerie. Ils dressèrent en un temps record record un bucher juste là, à quelques mètres de nous, et y installèrent les prisonnières . Quand les flammes commencèrent à lécher leur tunique, c’était comme si je ressentais moi – même cette morsure infâme. Je leur hurlais d’arrêter, que jamais au grand jamais, elles ne s’étaient données au diable. Mais ces humains là ne savaient pas écouter les arbres. Mes appels étaient vains, ils se réjouissaient même du supplice, convaincus de s’être débarrassés d’une vile engeance de sorcières. J’ai du supporter ce rituel de nombreuses fois au cours de ma vie , dès que j’apercevais des hommes en armes monter par le sentier, je sentais se figer ma sève, j’étais comme tétanisée par ce qui m’était imposé .
Heureusement un jour tout s’est arrêté, des hommes sont venus retirer la croix de pierre qu’ils avaient installée à côté du bucher pour la transporter au village. J’ai enfin pu reprendre mes habitudes sans me soucier de qui venait . Nous les quatre tilleuls , avons retrouvé notre tranquillité même si parfois certains groupes de marcheurs s’attardent à nos côtés, comme s’ils voulaient entendre notre témoignage. Mais j’avoue qu’il m’est très difficile d’évoquer cette période, je ne l’ai comptée qu’à quelques privilégiés .
Récit de faits terribles mais si bien raconté! Du coup tu me donnes envie d en savoir un peu plus sur ce lieu 😀bonne nuit Bisous
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1 avril 2019 à 0 h 22 min
Quand l’arbre devient plus humain que les hommes si cruels : j’ai beaucoup aimé. Bisous
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1 avril 2019 à 4 h 40 min
On dit souvent, si les arbres pouvaient parler mais, en ce jour, c’est fait pour nous, du moins. J’♥ beaucoup cette tranquilité retrouvée pour ce tilleul et ses frères.
Bonne semaine et beau mois d’avril, Gisèle !
Bisous♥
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1 avril 2019 à 5 h 22 min
Un jour j’avais écrit sur la foret
Lieu où je me sens bien
Bonne journée
Et bon mois d’avril 🙂
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1 avril 2019 à 8 h 22 min
Quand les arbres centenaires se mettent à parler …. Une histoire terrible que tu viens de nous conter Jazzy. Merci !
Bises et bon début de semaine
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1 avril 2019 à 8 h 27 min
j’ai aimé cette histoire .. que nous etions cruels le sommes nous encore ??bises
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1 avril 2019 à 9 h 08 min
La nature est moins cruelle que les hommes… Frissons et paix se mêlent en ton récit.
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1 avril 2019 à 10 h 03 min
Une histoire terrible qui malheureusement se répétait souvent…la bêtise humaine ça ne changera jamais. Bonne journée. Bises
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1 avril 2019 à 10 h 30 min
Oui c’est une bien cruelle histoire hélas et quand j’ai lu tes citations et ton introduction, j’ai plutôt pensé aux arbres qui servaient à la pendaison et aux branches desquels on laissait les pendus pendant des jours et des semaines en guis de dissuasion et bien sûr à la ballade des pendus de François Villon. Terrible et par les temps qui courent, terriblement importante à connaitre si du moins cela peut servir à ne pas verser dans d’autres folies. Bises et belle journée
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1 avril 2019 à 11 h 21 min
Si les arbres pouvaient raconter ( comme tu l’as si bien fait) les horreurs qu’ils ont connu, il n’y aurait peut-être plus de violence sur terre
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1 avril 2019 à 11 h 55 min
On rêve que ces tilleuls, spectateurs impuissants, se mettent à secréter un poison qui n’atteindrait que les scélérats…
Merci Jazzy de nous avoir fait pénétrer dans le secret de ces quatre vénérables.
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1 avril 2019 à 13 h 57 min
Les arbres sont des témoins de l’histoire, dans le tronc de certains on peut trouver des éclats d’obus dans la Somme.
Les arbres ont refermé leurs plaies en poussant mais quand il faut en couper un les chaines de tronçonneuse s’en souviennent.
Bonne semaine.
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1 avril 2019 à 15 h 34 min
C’est tellement vrai que les arbres et la nature sont témoins impuissant de la folie des hommes. Bravo Gisèle le récit fais froid dans le dos mais il est beau. Bisous douce semaine
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1 avril 2019 à 16 h 00 min
Une histoire terrible !! Il en a vu des horreurs ce Tilleul !
Bizzz
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1 avril 2019 à 18 h 50 min
Bonsoir Gisèle, je frémis, une si terrible histoire Bisous MTH
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1 avril 2019 à 21 h 23 min
Pingback: De petite graine à grand arbre, défi 218 : vos participations – le blog de la communauté des croqueurs de mots
Ils en ont vu de toutes les couleurs ces arbres ! C’est beau un tilleul pourtant . Heureusement qu’à présent ils coulent une existence tranquille . C’est bien raconté. Bonne soirée
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2 avril 2019 à 20 h 02 min
une histoire tragique qui nous rappelle que les hommes n’aiment pas les gens différents. Une histoire attachante. Merci de nous rappeler des histoires d’avant ; aujourd’hui, l’on s’attaque à l’homéopathie … bises et merci pour ta participation.
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2 avril 2019 à 20 h 30 min
C’est un texte très bien écrit et très touchant. Bel éclairage sur les femmes sorcières que nous sommes toutes !
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3 avril 2019 à 17 h 49 min